Moïse Sadoun P h o t o g r a p h i e s
Le théâtre de la forêt
Ces différents travaux photographiques sont liés à une pratique à la fois déambulatoire et introspective: marcher dans les arbres, c’est regarder, parcourir, réfléchir, projeter, s’interroger sur notre rapport au monde et au lieu, avec la profonde conviction que la relation avec l’arbre est une relation avec nous-mêmes. Cette approche va s’imprégner du test projectif dans lequel on demande de dessiner un arbre avec pour hypothèse que ce dernier est la représentation symbolique du corps vécu.
Marcher parmi les arbres, c’est aussi entrer dans une dimension symbolique et esthétique de la vie commune, à la rencontre de l’autre. Lieu de mémoire et de médiation entre la terre et le ciel, l’arbre synthétise l’ordre et le désordre, la beauté et le danger, l’esprit et le corps, la pensée et la matière.
Cependant l’arbre ne se livre qu’au regard de celui qui parvient à faire tenir ensemble les racines et les branches, le tronc et l’écorce, le dehors et le dedans, le détail et les sensations, les ombres et la lumière, l’opacité et le mouvement. C’est ainsi que l’on entre dans la forêt profonde, dans le théâtre de la forêt.
Dès lors, une communication silencieuse s’installe, l’image de l’arbre est intériorisée, parfois épurée de toute matérialité, dans un mixte hésitant de vaporeux et de dense, de lignes et de contrastes. Je ne suis plus seul. L’arbre devient un confident, un alter ego, un arbre-muse. Il se donne à voir comme un moi humain. Sa verticalité, son énergie, son assurance fascinent et génèrent des rapports de sensibilité, libérant ainsi un jeu infini de représentations esthétiques et symboliques.